5 questions posées à Jean-Bernard Falco Président de Centaurus & Membre du Board Le Club by THCC

Comment vivez-vous la crise COVID depuis le début 2020 ? & Quelles actions avez-vous mis en place depuis 2020 au sein de vos établissements / votre groupe ?
"La priorité absolue a été de mettre à l’abri l'ensemble de nos 1.200 collaborateurs en France et au Portugal et ce, dès le 14 mars, à l'avant-veille de l’allocution de notre Président qui décrétait le 1er confinement. Nous nous sommes alors organisés en conséquence et avons fermé tous nos hôtels immédiatement, conscients de notre responsabilité sociale et sociétale, notamment vis-à-vis de nos collaborateurs. Eu égard à notre présence en Chine, nous avons commandé immédiatement les kits de protection nécessaire en prévision de la réouverture de nos hôtels, et avons été parmi les premiers à être approvisionnés. Nous avons même pu en faire bénéficier nos confrères et de nombreux chefs d'entreprises grâce aux différents réseaux auprès desquels nous sommes adhérents. Nous avons mené, comme nombre de nos confrères, de nombreuses réunions digitales et formations afin que chacun puisse rester actif pendant cette première période très difficile. Dès le 11 mai 2020, nous avons procédé à la réouverture de la majorité de notre parc hôtelier en proposant à celles et ceux qui le souhaitaient et qui étaient alors sans activité de se mettre à la disposition de leurs collègues. La majorité de nos collaborateurs a joué le jeu et ils ont été très moteurs et très contributifs.
Quant à nous, nous avons faire preuve de beaucoup de bienveillance à leur égard pendant toute cette période. Nous avons agi de nouveau, lorsque, malheureusement, il a fallu à nouveau refermer nos établissements lors de la 2ème vague à l'automne dernier. Là encore, nous avons tenu à animer de nombreuses réunions pour ne pas les laisser sans activité. Très impliqué auprès des instances gouvernementales, nous leur fournissions, jour après jour, toute l'information nécessaire afin qu'ils comprennent bien tous les enjeux économiques, sociaux et sociétaux. Je dois avouer que ces attitudes nous ont permis d'acquérir de l'expérience qui a été très bénéfique pour affronter les 3ème et 4ème vague, qui ont été mises à profit pour réitérer toutes les actions que nous avions menées jusque-là. Je pense que tous nos collaborateurs sont devenus aujourd'hui des experts des protocoles sanitaires à mettre en place, en capacité de distinguer parfaitement un pass sanitaire et un parcours vaccinal et probablement pour certains d'entre eux, capables même d'être des experts susceptibles d'être interrogés par les plus grandes chaines d’informations nationales. 😊"
Comment voyez-vous l'avenir de l'hôtellerie ?
"En cette rentrée 2021, nous avons décidé de prendre le risque de rouvrir l'intégralité de notre parc hôtelier, soit environ 30 hôtels et si l'activité n'est pas encore au top niveau, nous avons la chance de profiter d'une croissance mondiale, européenne, française et donc régionale plus impactante positivement que ce à quoi nous pensions avant cette réouverture intégrale. Nous avons l'intime conviction que ce n'est que le début d'une forte activité qui va poindre dans notre secteur avec, c'est certain des disparités régionales pour certains acteurs et des difficultés économiques sans aucun doute aussi pour d'autres. Je pense que si l'on prend le PIB de la France en 2019 (environ 2.500 milliards d'euros) et que nous retranchons 10%, cela représente encore 2.250 milliards d'euros de valeur ajoutée produite par l'ensemble des acteurs économiques français. Le tourisme représentant, en France, près de 8% de cette masse, cela représente encore 180 milliards d'euros de VA annuelle. Même si l'on considère qu'aujourd'hui pour les raisons que l'on connaît que le poids du tourisme dans le PIB national n'est probablement plus aussi significatif et que l'on peut situer aux alentours de 5/6%, cela représente encore plus de 100 milliards sur une année pleine. Si l'on imagine que la croissance mondiale pour ces 12/24 prochains mois s'élèvera à 5/6% et celle de la France à 4/5%, nous devrions assez rapidement retrouver les niveaux de 2019 de création de richesse pour notre beau pays. Dit en d'autres termes, si l'on considère que le tourisme représentera 7% du PIB prévisionnel de la France à fin 2022 (soit 2.500 milliards d'euros), alors cela représentera pour notre secteur, une enveloppe de près de 175 milliards. En conséquence, sur ces montants, l'hôtellerie, qui représente près de 20% de cette enveloppe, pourra compter sur une valeur ajoutée de près de 35 milliards d'euros, ce qui représente près de 3 milliards d'euros par mois.
Nous le voyons bien, la France, plus beau pays du monde et qui sera appelé à être de nouveau très fréquenté à moyen terme, pourra bénéficier de cet élan de croissance mondiale, européenne, française et aussi régionale. L'industrie du tourisme a toujours su se relever après avoir vécu des crises très significatives : crise économique de 1990, attentats parisiens déjà en 1995, grèves qui ont paralysé le pays en décembre 1995, attentats des Twin Towers, guerre en Irak, retournement de l'effet €/$ en 2003, le SARS déjà en 2003 aussi, attentats à Londres et Madrid en 2005 & 2006, faillite de Lehman Brothers en 2008, crise de la dette publique européenne de 2010 à 2013, les attentats meurtriers en France en 2015 et à Bruxelles l'année suivante et enfin la pandémie de la COVID-19°. Dès lors, je fais partie de celles et ceux qui pensent que notre secteur est un secteur de développement pérenne et qui offre une chance exceptionnelle à toutes et à tous de réussir sa vie sociale et sociétale avec passion même si effectivement, le secteur va devoir s'adapter à ce nouveau monde qui se dessine devant nous."
Selon vous quelles sont les 3 difficultés / challenges que l'hospitalité va rencontrer ?
"La première des difficultés est qu'il va falloir s'adapter, comme je l'évoquais juste avant à ce changement de paradigme qui est en train de s'opérer devant nous. Évidemment, la prise en compte des impacts environnementaux de notre secteur sera une des données clés des réflexions et des actions des professionnels pour les prochaines années avec la prise en compte du facteur temps qui est malheureusement trop souvent négligé et il est vrai, peu compatible avec ces enjeux ; référons nous à la problématique de la recharge des voitures ou autres motos électriques par exemple pour comprendre qu'il y a une différence fondamentale entre la prise de conscience de ces enjeux (principe) et le temps qu'il va falloir pour s'y adapter car nous allons avoir besoin d'aides de la part des acteurs politiques pour accélérer cette transformation (quantum)
La seconde est que les acteurs économiques que nous sommes allons devoir nous remettre en cause et réfléchir à proposer à nos collaborateurs autre chose que les simples formations auxquelles nous nous accrochons et que, dans une période probablement inflationniste, comme celle que nous allons vivre, faire de notre secteur une industrie plus attractive et là encore il va falloir que les acteurs politiques entendent ce que nous aurons à dire à ce sujet
La troisième est le niveau de dette insoutenable qui est celui de nombre d'acteurs aujourd'hui. En effet, comment imaginer être capables de rembourser ses dettes historiques, ses nouvelles dettes (issues de la nécessaire mise en place des PGE par exemple), des arriérés de paiements de loyers et de cotisations fiscales de toutes sortes avec une activité qui va, certes augmenter significativement, comme je l'évoquais juste avant, mais insuffisante néanmoins pour faire face à tous ces paiements ?
Là encore, les acteurs économiques que nous sommes allons devoir prendre la parole, la plume et mener de nombreuses actions pour obtenir de la part du gouvernement des adaptations sectorielles absolument obligatoires si l'on veut que la France conserve sa place de numéro 1 mondial dans l'art de recevoir, l’hospitalité et la tradition française."
Pour vous, quel est l'intérêt pour un groupe tel que le vôtre de rejoindre THCC ?
"La communauté THCC est faite de propriétaires et d'exploitants individuels, d'entrepreneurs qui sont en contact tous les jours avec les collaborateurs, les clients et les partenaires. C'est un atout indéniable par rapport à d'autres réseaux qui ne permettent pas des rencontres d'aussi bonne qualité et qui permet d'échanger sur des problématiques opérationnelles concrètes en partageant nos expériences « terrain » de propriétaires et en nous permettant d'analyser les réponses apportées par chacun de nous à tel ou tel problème.
Les différentes thématiques proposées aux membres du réseau, grâce à l'appui de ces expériences de propriétaires ou d'experts choisis minutieusement dans chaque domaine est un gage de confiance important pour nous autres hôteliers.
Enfin, le réseau THCC et sa direction partagent les mêmes valeurs que les hôteliers, puisqu'eux-mêmes exploitants, et tous ces sujets visés plus haut largement détaillés ici font partie de leurs réflexions actuelles et souhaitent se donner les moyens de drainer les hôteliers susceptibles de les rejoindre pour aider non seulement la communauté THCC à résoudre ces problématiques à venir très importantes mais également à apporter des réponses ou des débuts de réponses, à leur place, humblement et modestement à de nombreux confrères.
Pour ma part, et alors même que je suis sollicité pour devenir membre du CA de telle ou telle société ou organisation, je refuse généralement considérant que mon emploi du temps ne me permettra pas de répondre aux attentes de celles et ceux qui me demandent de les rejoindre.
En revanche lorsque Oliver m’a fait cette demande et au-delà de la fierté et l'honneur qui ont été miens d'accepter de rejoindre THCC en tant qu’adhérent et au board, j'ai accepté de suite parce que, encore une fois, je partage les mêmes valeurs que l'immense majorité de la communauté et que comme eux toutes et eux tous, je suis un passionné et surtout un fervent défenseur de notre industrie, qui je le rappelle, est le 1er secteur d'activité en France.
Donc, à ma place, humblement et modestement, je mettrai à la disposition du réseau toutes mes compétences et en échange, je suis persuadé de m’enrichir intellectuellement aux côtés de cette très grande communauté très respectée dans notre secteur."
Merci de votre retour et investissement à nos côtés, Jean-Bernard !